La collection d’art Renault fête ses 50 ans d’existence, comment a-t-elle démarré ?
Tout est parti d’une idée originale de mécénat. En 1967, Claude Renard, cadre supérieur de Renault, amateur d’Art et ami de Malraux, a voulu rapprocher le monde de l’entreprise et celui de l’art contemporain en établissant des collaborations ponctuelles avec des artistes. L’intention de départ n’était pas de réaliser quelque chose dans la durée. Cela relevait plutôt d’une démarche intuitive, sans objectifs affichés, soutenue par Louis Dreyfus, le PDG de l’époque.
Peut-on comparer la collection d’art Renault aux collections actuelles liées à une entreprise ?
Non car à l’origine l’idée n’était pas de « collectionner » mais d’organiser une rencontre fertile avec les artistes de son temps. L’art contemporain n’était, alors, ni une valeur spéculative, ni un signe de prestige, tout au plus un terrain d’expérimentation, une aventure humaine. C’est pourquoi le projet était d’initier une collaboration vivante avec l’artiste et non d’acheter des œuvres finies.
Le monde de Renault est vaste. Comment cela fonctionnait-il ?
Les artistes qui se sont prêtés au jeu ont pu choisir les départements ou postes de travail qui les intéressaient. Par exemple, Tinguely, qui s’intéressait aux machines et Arman, qui accumulait les objets standard, se dirigèrent volontiers vers les chaînes de montage et les ateliers.
Renault a-t-il joué un rôle de producteur avant l’heure ?
Oui, puisque les œuvres étaient fabriquées avec les ateliers Renault. La Régie gardait seulement quelques pièces, le reste revenait aux artistes. Arman a réalisé 150 œuvres et la collection en possède une vingtaine. Par ailleurs, le projet avait aussi pour ambition de faire apprécier l’art contemporain au personnel de Renault en créant des rencontres avec les artistes.
Quand avez-vous repris en charge la collection ?
En 1996, j’ai été sollicitée pour reprendre en charge la collection : à l’époque 35 artistes de renom et près de 350 œuvres. Depuis, au gré des relations internationales de l’entreprise, nous avons exposé la collection au Japon, au Mexique, au Brésil, en Israël, en Russie, en Arabie Saoudite, en Turquie, en Chine, à Pékin et à Wuhan où s’est installée une grande usine Renault. Avec l’expansion des démarches corporate vers l’art aujourd’hui, l’action de Renault dans l’art de son temps fait figure de précurseur.