Comment faire coïncider la production d’électricité et les besoins réels des consommateurs ? C’est l’une des ambitions du smart grid, un concept de « réseau électrique intelligent » qui part du principe que l’on peut optimiser la production et la distribution d’une ressource en mesurant précisément la façon dont elle est consommée.
L’électricité est par définition difficile à stocker dans des proportions importantes. Cet équilibrage doit donc être réalisé de façon constante et au plus près du temps réel. Quand la production n’est pas suffisante, une partie du réseau n’est plus alimentée ; mais si l’inverse se produit, l’énergie produite en excédent est majoritairement perdue.
Le smart grid est la réponse technologique à cette problématique. Il met en œuvre une large panoplie d’outils communicants qui se chargent d’ajuster le plus précisément possible l’offre à la demande. Pour y parvenir, le réseau électrique s’appuie sur des capteurs, chargés de mesurer et observer en temps réel la consommation, mais aussi sur des algorithmes informatiques complexes, capables d’analyser les données à grande échelle pour anticiper les variations et prévenir les perturbations susceptibles d’affecter la distribution.
L’époque où l’on pouvait voir le réseau électrique comme une infrastructure de transport à sens unique est donc révolue : désormais, chacun des maillons de la chaîne participe à cette mission d’équilibrage en faisant remonter des informations sur son état et sa consommation vers le producteur d’énergie.
Le smart grid se révèle être un outil précieux pour le fournisseur d’énergie. Grâce à cette intelligence, il optimise la gestion de son réseau, limite les pertes et se prépare aux pics de consommation, mais pas seulement.
Le smart grid se révèle être un outil précieux pour le fournisseur d’énergie. Grâce à cette intelligence, il optimise la gestion de son réseau, limite les pertes et se prépare aux pics de consommation.
Quand l’électricité provient d’une unique centrale, il est assez facile d’augmenter ou d’abaisser le volume de production pour refléter les besoins de consommation. L’équation est en revanche nettement plus complexe quand il faut prendre en compte des sources d’énergie dont le caractère intermittent provoque des instabilités sur le réseau. L’intelligence se met ici au service de l’intégration maximum des sources d’énergie renouvelables. Ce faisant, elle permet de privilégier la production d’une électricité bas carbone conformément aux ambitions de la transition énergétique.
L’arrivée du smart grid ouvre également des perspectives du côté de l’utilisateur final, qui consulte désormais au jour le jour et dans le détail sa consommation d’électricité via son compteur intelligent. Plutôt que de se contenter d’un index global, il accède ainsi à des informations précises susceptibles de l’aider à optimiser ses dépenses énergétiques, en programmant précisément son chauffage ou en planifiant la recharge de sa batterie de voiture électrique pendant les heures creuses. Ce faisant, il réduit sa facture, et participe à la stabilité du réseau en lissant la courbe de la consommation au cours du temps.
Pourquoi se limiter à des échanges d’informations ? Envisagée de façon littérale, l’expression smart grid (en français : réseau intelligent) appelle à sortir du modèle linéaire production/distribution/consommation pour basculer vers une véritable logique de maillage. Cette fois, il ne s’agit pas que d’une simple remontée d’information : le consommateur devient partie prenante de l’activité du réseau.
La pratique est déjà courante : à l’échelle individuelle, de nombreux particuliers dont la maison est équipée de panneaux photovoltaïques produisent aujourd’hui une électricité qu’ils consomment en direct ou revendent à leur fournisseur attitré. Au niveau collectif, le smart grid donne naissance à des bâtiments durables dont la consommation électrique et l’empreinte carbone sont optimisés pour l’ensemble des occupants.
Parfois, le smart grid est mis en œuvre à l’échelle d’un quartier, d’une commune ou d’une collectivité en soutien à des projets de type ville intelligente, ou « smart city ». C’est le cas par exemple à Utrecht, aux Pays-Bas, où les voitures électriques du service d’autopartage sont rechargées grâce à des panneaux solaires installés sur le toit des bâtiments voisins. Le smart grid permet aussi de proposer un service innovant soutenu par une énergie bas carbone. La mise en place d’un tel dispositif suppose toutefois l’étroite collaboration d’acteurs venus d’horizon très divers : pouvoirs publics, fournisseurs d’électricité, startups spécialisées, etc.
Forte de la capacité de stockage de sa batterie et de fonctions toujours plus connectées, la voiture électrique illustre presque naturellement les bénéfices du smart grid, avec lequel elle peut désormais interagir. L’échange d’informations constitue un premier niveau de collaboration mais d’autres technologies permettent de faire jouer à la voiture un rôle actif dans l’activité du réseau électrique.
Forte de la capacité de stockage de sa batterie et de fonctions toujours plus connectées, la voiture électrique illustre presque naturellement les bénéfices du smart grid, avec lequel elle peut désormais interagir.
Avec la recharge intelligente, la charge du véhicule peut par exemple être déclenchée à la demande, en fonction d’instructions visant à privilégier une énergie locale ou renouvelable. Suivant la même logique, le fournisseur peut interrompre temporairement la charge pour laisser passer un pic de consommation et donc soulager le réseau de distribution. Ce principe permet de limiter les coûts pour le consommateur final.
Le Vehicle to Grid (V2G) incarne quant à lui une participation plus active, puisqu’il permet à la voiture de réinjecter une partie de l’électricité de sa batterie dans le réseau de distribution. La capacité de stockage de la voiture électrique devient ainsi une sorte de réserve dans laquelle il sera possible de puiser pour des besoins ponctuels : la recharge devient bidirectionnelle.
Les batteries de voitures électriques trouvent également leur place dans des projets de stockage stationnaire, notamment en seconde vie. Ces installations peuvent stocker l’électricité verte – dès qu’elle est produite, là où elle est produite – pour la rendre disponible aux consommateurs quand ils en ont le plus besoin. De quoi favoriser l’essor de la production d’électricité bas-carbone à partir d’énergies renouvelables intermittentes comme le solaire ou l’éolien.
Copyrights : tobntno, Natali_Mis, courtneyk, RoschetzkyIstockPhoto